Influence artistique de Rudolf Noureev

« Pour garder un ouvrage théâtral vivant, pour qu’il ait le même effet sur le public que le jour de la création, il doit sans cesse évoluer. Sinon, il est mort, il est comme une pièce de musée sous sa vitrine, qui ne mérite pas de durer ».

 

Doté déjà d’une présence magnétique, focalisant les regards du public, il paraissait en scène un mélange détonant de beauté sauvage et d’esthétique classique : à la fois Dionysos et Apollon ! Artiste virtuose, il le fut, mais au-delà d’une technique brillante acquise par un travail acharné, il sut aussi danser ses rôles en acteur, apportant au ballet une vérité dramatique à l’égale du théâtre et du cinéma. Rudolf Noureev aura largement contribué à revaloriser la danse masculine et, en travaillant avec des chorégraphes contemporains, à dépasser les clivages « classique / moderne ».

Son influence sur la danse est comparable à l’importance qu’a eu Callas pour l’art lyrique : après elle, on n’a plus chanté ni abordé un personnage d’opéra de la même façon. Après Noureev, il est devenu indispensable aux danseurs de s’investir profondément dans leurs rôles. C’est en se produisant avec le Royal Ballet de Londres que Noureev a pu rencontrer des chorégraphes comme Frederick Ashton, Kenneth MacMillan, Glen Tetley, Roland Petit, se familiarisant avec leur langage, et découvrir aussi des plus jeunes (comme Rudi van Dantzig), les aidant à se faire connaître davantage.

Rudolf aimait beaucoup les chorégraphes. Il disait toujours que la danse ne peut évoluer qu’avec eux. Noureev mesurait bien l’importance des recherches de la danse contemporaine. Ayant fait lui-même l’apprentissage de la « modern dance »américaine, de Martha Graham à José Limon – une danse s’ancrant dans le sol, alors que la danse classique tend à s’en éloigner – il se mit à produire, dans ses propres chorégraphies, y compris dans ses relectures des « classiques » de Marius Petipa, certains éléments empruntés aux techniques « modernes ».